samedi 16 juin 2012

André Courrèges - Réalité - 1965

Réalité - 1965 - article "les quatre jeunes insolents qui dictent la mode"

Ascétique, mystérieux et volontairement anti-conformiste, Courreges est devenu l'un des plus grands créateur de la mode à paris. Il veut imposer aux femmes une tenue audacieuse faite à base de jupes très courtes aux couleurs violentes, de bottines, de pantalons très blancs.



André Courrèges - Réalité - 1965 interview



Courrèges, c'est l'avant-gardiste, le couturier qui fait des robes comme Pininfarina fait des carrosseries de voitures. Sobres, fonctionnelles, découpées mathématiquement.

André Courrèges n'a fait vraiment parler de lui que l'année dernière en présentant dans sa collection beaucoup de pantalons et en disant : « Dans deux ans, toutes les femmes porteront mes pantalons. » II le déclara avec un accent béarnais très fort.

« Enfin, un couturier non sophistiqué » dirent les journalistes. Il est certain que Courrèges porte une grande rudesse en lui, des silences profonds, des allures décidées : «Moi je ne me mets pas à plat ventre. Je me bats
et je vaincs. » Les employées lui obéissent respectueusement car lui aussi a  eu l'occasion d'obéir aveuglément : il resta pendant quinze ans, obscur coupeur, au service de Balenciaga.

Aujourd'hui, la presse américaine parle énormément de Courrèges, la presse française a suivi... Pourtant les couleurs criardes, disons vives, les formes rectangulaires des vestes, des robes, désorientent encore. Et cependant Courrèges devient la sensation du monde de la mode. C'est de lui qu'on attend les prises de position les plus catégoriques, les nouveautés les plus fracassantes

Courrèges, quarante ans, est grand,visage en lame de couteau, presque chauve, une longue blouse blanche qui tombe aux mollets, l'air d'un ingénieur électricien ou bien d'un dentiste.
Chez lui, l'atmosphère est pleine de rigueur, petites pièces, longs rideau : tout est blanc, chaises qui ressemblent  à des prie-dieu, surmontées de coussin, tapis, murs.
Les employées portent des bottines « riquiqui », des jupes au dessus du genou, l'air très collégienne avec les cheveux ras du cou et la poitrine pas encore très développée.

Sorti du néant en août 1961 avec dix ouvrières entassées dans un fond de cour, Courrèges en emploie aujourd'hui plus de soixante, possède un carnet de commandes complet pour plusieurs mois.

« J'aime la difficulté. Les femmes, il faut les violer ! Elles se perdent dans les détails. Elles ont des préjugés : je ne veux pas montrer mon genou parce qu'il n'est pas joli... Qu'est-ce que ça veut dire ? Le problème n'est pas là, la beauté n'est pas une question de genoux mais de rythme. Dix centimètres au dessous du genou détruisent l'harmonie, la jeunesse, l'équilibre. Pour dix centimètres, les femmes préfèrent être des grand-mères. Elles pensent que la féminité se prouve à coup de perruques, de bijoux, de talons hauts. Ah ! les talons hauts, une catastrophe. Elles s'imaginent paraître plus grandes avec des talons.
Quelle erreur ! La mode, ma mode c'est quelque chose qui est clair, vivant, simple, en harmonie avec notre
époque."

« Les clientes refusent de porter des couleurs claires en hiver. Mais le clair c'est un état d'esprit, disons une vision différente du monde. Ne serait-ce que parce qu'une robe blanche est plus salissante et qu'il faut
la laver. Ça oblige à une certaine hygiène.
Un grand journal anglais m'a fait une proposition, dernièrement. Il m'a dit : « M.Courrèges, nous voulons vous aider. Nous allons faire un grand article sur vous. » Je lui ai répondu : « Merci. Mais ça ne m'intéresse pas.Vous arrivez après la bataille. Je n'ai plus besoin d'être aidé... »




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